MEN IN BLACK 3-Paradoxe temporel
En 1997, Men in Black de Barry Sonnenfeld avait été le succés surprise de l’été. Ce film était devenu culte pour ceux qu’on n’appelait pas encore les geeks. Cette comédie de SF, adaptée d’un comics, avait su proposer une véritable ode à un tout pan science-fictionnel (hommes en noir, aliens présents sur Terre à notre insu, théorie du complot) via un traitement naviguant, avec un certain talent, entre premier et second degré. Dans la foulée, une série animée voit le jour (assez sympa au demeurant). En 2002, l’inévitable séquelle, toujours signée Sonnenfeld, voit le jour mais la magie n’opère plus: si le film reste regardable, le script (paresseux à souhait) sert la soupe à Will Smith et ses pitreries, sans rien proposer de neuf, excepté 2 ou 3 séquences réussies grâce au talent de Sonnenfeld. Sans être un désastre, le film encaisse une contre-performance au box-office, à tel point que la franchise (série animée comprise) est stoppée net pendant 10 ans. Quand le troisième volet (sous l’impulsion du producteur Steven Spielberg) se met en chantier, personne n’y croit plus, d’autant que les problèmes s’enchaînent (le scénario n’était pas fini au début du tournage, par exemple). Et pourtant, au contraire de la baudruche Prometheus que tout le monde voulait voir, Men in Black 3 s’impose comme une petite réussite.
Déjà, le scénario renferme une idée géniale: le voyage dans le temps. Suite à l’évasion d’un alien trés dangereux, Boris l’Animal, du pénitencier Lunar Max, la vie de nos agents préférés, J et K, va être chamboulée. Boris trouve le moyen de retourner en 1969 pour tuer K. J va alors tout faire pour rétablir l’ordre des choses car la survie de notre planète en dépend. Confronter l’univers des Hommes en Noir avec le mythe du paradoxe temporel est un pur fantasme qui s’assouvit parfaitement dans le film. Car loin de se contenter de faire une simple comédie « anachronique » (style « Les Visiteurs ») en opposant J au contexte de l’année 69, Sonnenfeld livre une sorte de rêve nostalgique. Car le film n’est pas adapté aux normes du blockbuster de notre époque (genre les Transformers de Michael « je fais mal aux yeux » Bay). On a affaire à un film qui retrouve l’essence du film originel de 97, mais aussi de tout un pan du cinoche des années 80 (Retour vers le Futur, C’était Demain). Le final, par exemple, n’est pas un truc super spectaculaire qui explose partout mais une scéne d’action, certes trépidante, mais finalement assez old school, lisible, trés bien découpée et qui renvoie à la SF des années 70, voire 60.
Men in Black 3 est un film super ludique. Les scènes d’action sont trés réussies et bien montées. Mais elles ne constituent pas l’essentiel même si le plaisir qu’on y prend est grand (voir l’évasion de Lunar Max ou la poursuite en « rétro mobylette »). Le second degré légendaire de Sonnenfeld se déploie içi avec aisance, sans verser dans le cynisme. La double lecture est constante (notamment le racisme des années 60 évoqué là par un contrôle routier ou dans un dialogue entre K et son supérieur qui ne semble pas faire grand cas des pertes extra-terrestres lors d’un accident). C’est malin et assez subtil. D’autant que l’aspect comique est parfois savoureux (ah, Andy Warhol..). Visuellement, Sonnenfeld assure et s’autorise des moments ultra-jouissifs (le passage en 1969 via un plan-séquence hilarant en est le parfait exemple).
Mais le plus surprenant dans ce film, c’est le facteur émotion. La nostalgie, mentionnée plus haut, instille souvent ce sentiment. Le voyage dans le temps aussi. Et le final du film vous sert la gorge. Etonnant pour du Men in Black! Et puis le côté paradoxe temporel est aussi accentué par un personnage instantanément culte: Griffin, un alien doté d’un pouvoir trés particulier. Au début il nous fait rire mais loin d’en faire un bouffon, Sonnenfeld nous le rend attachant et émouvant (la scéne du match de base-ball ou la scène finale sur la plage). Enfin, terminer le film en mêlant la mythologie des Hommes en Noir avec un la grande Histoire est trés pertinent.
Alors oui, certains personnages secondaires manquent d’épaisseur (O par exemple) et on a l’impression qu’il manque des scènes (ceci est du au tournage chaotique) mais arrivé à faire un aussi bon film, cohérent et émouvant, dans ces conditions, est un petit miracle en soi. Note: 13/20
Men in Black 3 de Barry Sonnenfeld, avec Will Smith, Tommy Lee Jones et Josh Brolin, en salles depuis le 16 mai.
Laisser un commentaire
Vous devez être connecté pour rédiger un commentaire.