TO ROME WITH LOVE-Tous les chemins mènent à Woody
A Rome, ville éternelle de l’amour, plusieures histoires se déroulent, mais sans jamais s’entrecroiser: une jeune couple marié fera l’apprentissage de l’adultère, un architecte américain rencontre un compatriote étudiant et sera le témoin de ses amours compliqués, un bureaucrate anonyme devient la star des médias du jour au lendemain et un metteur en scène d’opéras américain rencontre le père du futur époux de sa fille, un croque-mort dotée d’une voix fabuleuse mais qui ne peut chanter juste que sous une condition bien particulière.
A la lumière de ce résumé, on voit qu’on a affaire à un film à sketchs, un genre un peu tombé en désuétude mais remis au goût du jour par le succés récent du sympathique Les Infidèles. Mais Woody Allen n’a pas attendu Lellouche et Dujardin pour écrire son film. Il s’agit d’une coïncidence plus que d’une tendance. Et comment notre cinéaste new-yorkais (en goguette en Europe depuis Match Point) préféré se sort-il de ce genre? Et bien, d’une façon éclatante, mes amis!
Evacuons d’abord le problème du lien entre les sketchs. Il n’y en a pas, à part peut-être les thèmes abordés. Certains trouveront cela décevant mais honnêtement, ce n’est pas gênant. Niveau écriture et dialogues, que dire? Tout simplement que Woody est à son meilleur niveau. Tout le film est léger, drôle, sarcastique, spirituel mais aussi teinté d’amertume (un peu comme dans le sous-estimé Vous Allez Recontrer Un Bel Et Sombre Inconnu). On se demande à quoi carbure le cinéaste de 76 ans pour avoir ce don du dialogue bien senti et des situations cocasses! Alors, bien sûr, au niveau de la thématique, Woody reste dans son fond de commerce préféré, l’amour et ses vicissitudes (adultère, tentation, hésitation, femmes tentatrices, artistes malheureux dans leur quotidien,…), mais quand c’est aussi bien fait que dire? Juste grazie maestro!
Côté ambiance et réalisation, c’est superbe. Woody filme Rome d’une façon ensoleillée. Il insuffle beaucoup de rythme à sa comédie de moeurs. Et n’oublions pas qu’en matière de comédie, si il n’y a pas de rythme, c’est mort! Ceux qui raillent la façon soi-disante vieillote avec laquelle filmerait Allen, on oubliait ce qu’est le Classicisme en matière de cinéma. Les acteurs se mettent au diapason et sont tous géniaux, avec une mention particulière pour Roberto Begnini, Alec Baldwin et Pénelope Cruz. Ah, Pénelope…
Mais dans ce dernier opus, Woody règle ses comptes avec la célébrité et les illusions qu’elle induit. L’histoire du personnage de Begnini est une critique à peine voilée et trés pertinente de la télé-réalité et de ses « stars » célèbres pour montrer leur intimité au yeux de tous. Mais Allen ne tape pas que sur ces pauvres bougres: les médias, complices et manipulateurs, s’en prennent aussi une bonne. A travers cette histoire, Woody flirte avec l’absurde et le surrréalisme. Cette tendance se retrouve aussi à travers la meilleure histoire de ce film: celle d’Alec Baldwin. Il rencontre un jeune étudiant qui lui ressemble et qui est en train de vivre la même histoire qu’il a vécue. Il le suit partout et essaye de le conseiller et de le mettre en garde. On se rend vite compte qu’il s’agit de lui-même et qu’il se promène dans ses souvenirs et essaye de voir comment il aurait pu éviter certaines erreurs. Un homme d’âge mûr, plein de regrets et de nostalgie, sans complaisance vis à vis de sa version « jeune ». Mais cette dernière (excellent Jesse Eisenberg) le regarde de la même façon et lui lancera un « Tu t’es vendu » qui reste au travers de la gorge. Woody plonge dans le « fantastique » avec cet homme qui se rejoue ses erreurs passées dans sa tête et les matérialise sous nos yeux. Original.
Alors, peut-être que la fin s’étire un peu, mais ce film est un vrai bonheur, un cadeau qui fait du bien, qui fait rire (mais pas que!). Bref, Woody Allen n’est pas mort. Et il est attristant de voir qu’une grande partie de la critique crie au navet. Cette même critique qui enscensait Woody, il y a peu. Ce retournement de veste me fait penser, ironiquement, à ce que subit Roberto Begnini dans le film. Note: 15/20
To Rome With Love de Woody Allen, avec Woody Allen, Alec Baldwin, Roberto Begnini Pénelope Cruz, Jesse Eisenberg, Ellen Page,… en salles depuis le 4 juillet.
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