FRANKENWEENIE-Sparky returns
Victor est un garçon solitaire, aimant les sciences, les films fantastiques et son chien Sparky. Ce dernier est son meilleur ami. Quant il meurt, renversé par une voiture, Victor est désespéré. Mais il va trouver un moyen de ramener Sparky d’entre les morts…
Les fans de Tim Burton auront reconnu içi le résumé de son court-métrage Frankenweenie (1984). A l’époque, Burton avait proposé à Disney, firme dans laquelle il travaillait, de faire de cet argument narratif un long-métrage d’animation en stop-motion. Le studio refusa, critiquant la forme (peu rentable) et le fond (trop sombre). Mais il allouera un petit budget à Burton pour que ce dernier puisse en réaliser un court-métrage live. Effrayé par la soi-disante noirceur du film, Disney en annulera la programmation en salles, juste avant la reprise de son Pinocchio. Invisible pendant une décennie, Frankenweenie reste la plus grande frustration de Burton. Celui-ci mettra deux décennies pour en récupérer les droits, toujours détenus par Disney. Il accepte de réaliser Alice Au Pays Des Merveilles (2010) pour le studio, à condition que ce dernier lui laisse réaliser un nouveau Frankenweenie en stop-motion. Le studio est d’accord. Et comme Alice est un carton au box-office, il laisse Burton libre sur Frankenweenie. Et Tim Burton de pouvoir, après 25 ans, enfin réaliser son rêve!
Et c’est bien de rêves dont il s’agit. De rêves d’enfant, plus precisemment. Il y a le rêve d’un gosse qui n’accepte pas la mort de son fidèle compagnon et qui veut le voir revenir. Et le rêve d’un autre enfant qui veut voir des monstres semer la panique dans une banlieue américaine bien proprette. Cet enfant-là c’est Tim Burton. Ou plutôt le jeune Tim Burton. Ce deuxième Frankenweenie lui donne l’occasion de réaliser un fantasme de gamin. Ce film est certainement (avec Edward Aux Mains D’Argent) son film le plus autobiographique. Car Victor, c’est lui. L’enfance de Victor, c’est la sienne. Le quotidien de Victor a été le sien, à une époque. D’où la fraicheur et la sincérité du film, bien loin des compromis et du calcul de Alice. Frankenweenie est un film trés émouvant, qui touche directement le spectateur en plein coeur. Et qui ressemble à Tim Burton.
La dernière partie du film n’est autre que le film de monstres dont il rêvait enfant. Le film débute d’ailleurs sur le film amateur (un film de monstres) de Victor avec Sparky. Ce rêve de petit garçon devient donc réalité par la suite. Et c’est ce que souhaite Burton (et il n’est pas le seul!): ne pas laisser les rêves mourir et tout faire pour les réaliser. Burton nous propose la vision d’un monde où la mort n’est pas une fin, où on peut faire revenir les disparus et où tout peut se réaliser. Et surtout, il ne faut jamais faire une compromission à un quelconque « esprit » adulte. Il est remarquable de constater que dès que Victor fait un tel compromis pour faire plaisir à son père, il scelle, sans le vouloir, le sort de Sparky et par là-même la fin de ses rêves enfantins. Mais père et fils se rejoindront à la fin. Et le père, l’esprit adulte, comprendra que les rêves de l’enfance sont plus importants parfois que le conformisme adulte. Burton parle trés certainement de sa relation avec son propre père. Mais ausssi des compromis qu’il a fait dans sa carrière et qui ne lui ont pas donné satisfaction.
Au passage, Tim Burton accumule les citations d’oeuvres qu’il admire et qui ont forgé son imaginaire, quand il était enfant: le nom de famille de Victor est Frankenstein, l’un des adolescents a la même démarche que Boris Karloff dans ce rôle, une tortue se prénomme Shelley (référence à Mary Shelley), Sparky est recousu comme la créature de Frankenstein, la petite chienne de la voisine arbore le look de la fiancée de Frankenstein. Autre référence aux Universal Monsters : La Momie. Dracula est cité aussi. La ville est dominée par un vieux moulin, cliché récurrent du cinéma gothique. Burton rend aussi hommage au kaiju-eiga (film de monstre japonais). Ces références-là sont plutôt classiques chez Burton. Plus surprenant: un clin d’oeil à Joe Dante (via Gremlins) et à…Steven Spielberg (et un plan qui renvoit directement à Jurassic Park), deux cinéastes qui ont, eux aussi, célèbré le triomphe des rêves d’enfant sur grand écran. Mais Burton cite aussi ses propres oeuvres: le personnage de Elsa Van Helsing, la voisine de Victor qui ressemble à Lydia de Beeteljuice (et doublée par la même actrice: Winona Ryder), le professeur de sciences qui est le portrait craché de Vincent Price (le créateur de Edward Aux Mains d’Argent). Ce dernier est doublé par Martin Landau, qui reprend son accent hongrois de Ed Wood, comme s’il doublait Bela Lugosi dans Dracula! Christopher Lee (autre célèbre interprète de Dracula) fait une apparition mais très surprenante (et qui montre que, parfois, les adultes restent des enfants qui aiment frissonner en cachette).
La réalisation de Tim Burton est plus inspirée que jamais (l’attaque de la fête foraine est un grand moment), le noir et blanc est magnifique et l’animation image par image est superbe. Il n’y a pas que Pixar dans la vie! Le film a des pointes d’humour noir bienvenues et on retrouve, avec plaisir, le Burton malicieux de Beeteljuice ou Mars Attacks! Il y a aussi des scènes qui font assez peur, par moments. Mais Frankenweenie est surtout trés émouvant. Difficile de ne pas mouiller ses yeux à la fin. Et le film se conclut sur un baiser final assez drôle! Note: 20/20
Frankenweenie de Tim Burton, en salles depuis le 31 octobre.
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