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Ego, la grande aventure
C’est parfois fatigant de dissimuler ce que vous ressentez vraiment. Cela peut même devenir pesant. Dans nos sociétés modernes, il faut toujours jouer un rôle et composer un personnage que l’on n’est pas. Etre soi-même est pourtant la chose la plus naturelle au monde mais, allez savoir pourquoi, quelquefois on va vous en vouloir et vous montrer du doigt pour avoir osé être vous-même, sans masque et sans artifices. Il faut être politiquement correct, il faut être consensuel, il faut être javellisé de l’intérieur. Bref, il faut être un animal social ennuyeux.
Mais que faut-il faire pour être soi-même? Je n’en sais rien. Vous êtes déçus. Vous pensiez que j’allais vous révéler un grand secret. Ce n’est pas grave. Je ne connais aucun grand secret. Je ne sais pas si il y a une vie après la mort et si l’entrée y est gratuite. Je ne sais pas si Jésus a vraiment existé et je connais pas la recette pour changer l’eau en vin. N’étant pas télépathe, je ne sais pas à quoi vous pensez en lisant ces lignes, sauf toi, petite coquine…Bref, je ne sais rien!
Alors comment répondre à cette question que j’ai posée au paragraphe précédent? Et bien, il me suffit de me prendre comme cobaye. Etant la représentation parfaite et universelle de l’humain moyen, je crois que je pourrais aboutir à un résultat probant.
Donc, comment être soi-même? Comment puis-je être moi-même? D’ailleurs, qui suis-je? Je suis allé demander un extrait d’acte de naissance là où j’étais né. Je fus rassuré d’avoir une existence légale. J’avais un nom, une date de naissance, des parents, bref, un état civil. Je suis bien moi, d’un point de vue légal. Il me fallait en être sûr. Je n’aurais pas aimé découvrir que j’avais usurpé ma propre identité. Vous vous rendez compte? J’aurais été moi mais sans l’être vraiment d’un point de vue administratif. Pire, mon nom n’aurait pu être qu’une invention, tout comme moi. J’aurais pu être une créature de fiction, comme toi, capitaine Haddock. Non, maintenant, j’ai ce bout de papier et je sais que j’existe. J’aime bien me faire peur mais là, j’ai vraiment paniqué pendant un moment!
Rassuré sur mon existence administrative et légale, je décidai de partir à la découverte de mon moi profond. Qui suis-je vraiment? En faisant le bilan de toutes ces années qui constituent ma vie, je m’aperçus que le constat n’était pas terrible. J’ai à peu près tous les défauts possibles et inimaginables: lâche, égoïste, associal, misanthrope, pas souriant et surtout, j’ai le vertige. Cette dernière tare m’a valu d’être exclu d’un club d’alpinistes. Le directeur du club m’a demandé: « Mais pourquoi vous êtes vous inscrit si vous avez le vertige? ». J’ai répondu: « Pour manger de la fondue. » Je suis, depuis, sur la liste noire de tous les clubs d’alpinisme.
Du point de vue du caractère, je suis donc un sale type. J’ai commis tant de mauvaises actions et blessé tant de personnes, que j’aurais du aller me confesser depuis longtemps. Bon, je l’ai déjà fait une fois, le prêtre a refusé de me donner l’absolution et m’a traité de monstre. Je m’en fiche un peu vu que je suis athée à la menthe.
Donc, si je veux être moi, suis-je condamné à être une horreur de la nature? Peut-être… A moins d’avoir en moi des trésors insoupçonnés de gentillesse et d’altruisme? Pas gagné… Cette réflexion sur moi même commence à me faire déprimer. Je vais la réorienter sur le plan des aspirateurs… non, des aspirations (pas une bonne idée d’écrire tout en picolant).
Je crois que je ne fais pas ce que j’ai envie de faire vraiment. Je pense que je n’ai pas encore trouvé ma place et que je n’ai rien accompli dans ma vie. Je suis donc comme les 3/4 des gens. Rassurant! Mais que faudrait-il que je fasse pour être moi-même? J’aime le cinéma, j’aime lire (copyright Bayard Presse), j’aime le chocolat, j’aime les histoires de Sherlock Holmes et qui se passe durant l’Angleterre victorienne, j’aime les westerns, j’aime Winona Ryder, j’aime la nature, j’aime le silence, j’aime les chiens, j’aime l’automne et l’hiver, j’aime Peter Pan et j’aime écrire des conneries. Il me faut donc trouver un mix de tout ça. Trop facile!
Pour être moi-même, je vais m’établir comme détective privé, m’habiller comme un dandy de l’ère victorienne, dresser des chiens policiers, mettre autour de ma taille un ceinturon avec un six coups, abandonner cette carrière au bout de 5 ans, me reconvertir dans le cinéma, faire des films d’après mes enquêtes, faire tourner et épouser Winona Ryder, fuir les mondanités, habiter un manoir à la campagne, m’exiler au Groenland en été, écrire mes mémoires qui seront d’énormes mensonges (le titre: « Comment j’ai rencontré le Yéti ou ma vie aventureuse ») et puis un beau jour, me gaver de chocolat, en faire une overdose, mourir et rejoindre le Pays Imaginaire.
Voilà, j’ai trouvé le moyen d’être moi, sans tricher. J’espère que cela vous aidera à vous trouver vous-même. Moi je commence demain à mettre mon plan à exécution. Il faut vivre ses rêves et envoyer se faire foutre le quotidien banal dans lequel nous nous engluons.
Cela me fait quand même un peu peur. Et si je n’y arrivais pas? Me reste toujours la possibilité d’être meilleur au quotidien et de ne pas me laisser gangréner par la triste réalité de la société dans laquelle je vis…
Le mois prochain, je vous relaterai ma rencontre avec le Yéti.
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